Déficit américain : une Grèce par mois !

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Alors que tous les regards se tournent vers la Grèce et les 120 milliards qu’il lui faudra en 2014 pour faire face au défaut de payement, Flore Vasseur rappelle que c’est exactement la somme dont les Etats-Unis – qui ont perdu 6,6 milliards de dollars en Irak – auraient besoin chaque mois pour combler leur propre déficit.

C’est cette semaine que le Parlement Grec doit voter son nouveau plan d’austérité, déclenchant alors le déblocage de la cinquième tranche du plan de sauvetage par la Troïka, soit 12 milliards de dollars. Toute cette semaine, on va nous revendre la soupe de ce vilain petit canard de l’Europe, ce nain de 2% de l’économie mondiale qui menace à lui tout seul, l’ensemble du si vertueux système financier mondial. Si les chiffres sont effrayants, ils ne viennent pourtant pas de Grèce, ni même d’Europe. La Grèce, c’est un amuse-bouche pour anorexique, par rapport à ce qui nous attend. Ou plus exactement, c’est un trompe l’œil : quand la Grèce a besoin de 120 milliards en 2014 pour éviter le défaut de paiement, les Etats-Unis auront besoin, à partir d’août – et sur la base des projections du déficit fédéral actuel – de ce montant -120 milliards donc – mais CHAQUE MOIS !

La semaine dernière, Nouriel Roubini, le Monsieur catastophe des Subprimes et Georges Soros ce dimanche jugent inévitable la sortie de certains pays de l’Euro, voire l’implosion de l’Union monétaire. « Il n’y a pas de plan B. C’est pour cela que les autorités s’accrochent au statu quo et insistent pour préserver les accords existants plutôt que de reconnaître leurs défaillances » déclare le grand manitou de la finance internationale, celui-là même qui fit fortune en spéculant contre la livre en 1992. Mais de qui précisément parle-t-il : de la Grèce, de l’Europe, ou de son pays, les USA ? Car de fait, c’est la question, la vraie : d’où vont sortir les 120 milliards mensuels dont l’Amérique a besoin quand la Chine n’achète plus de dette américaine depuis février dernier, que la FED est en faillite et que le pays a atteint son plafond de dette. Aux Etats-Unis, l’argent n’est pas seulement roi. Il n’a plus aucune valeur.

C’est ce que m’inspire cette histoire ubuesque de dollars, 6.6 milliards pour être précise, évaporés sous le soleil de Bagdad entre 2003 et 2005. C’est le Los Angeles Times qui racontait ce week-end l’événement. Nous sommes en 2003. George W Bush veut réussir sa guerre en Irak. Il envoie hommes, armes et beaucoup, beaucoup d’argent. C’est comme tout, pense-t-il, la paix s’achète. Bush veut remettre les ministères au travail et convaincre les élites locales que la vie post Saddam Hussein a du bon.

Il débloque 6.6 milliards en coupure de 100, tout droit sortis des coffres de la FED de NY dans le New Jersey. Stockés par palette comme de vulgaires pot de beurre de cacahuètes, ils sont emmenés par une noria de fourgons blindés jusqu’à un aéroport militaire du Maryland ; ils sont alors chargés dans des avions, 21 avions cargo Hercule 130. Arrivés à Bagdad, ils sont répartis dans des coffres de la ville, dans d’anciens palaces de Saddam Hussein ou sur des bases militaires. Et à partir de là, pendant deux ans, c’est « open bar ». Tout va très vite, l’argent, 6,6 milliards de dollars donc, est distribué par des fonctionnaires américains à des ministères irakiens ou des prestataires occidentaux oeuvrant tous pour la fameuse « reconstruction ». L’argent transite dans des sacs de sports placés à l’arrière de 4X4 filant pied au plancher dans une ville en feu. Les agents américains n’ont pas le temps, disent-ils de tenir une comptabilité. A sec dès 2005, le Pentagone jure que si on lui donne du temps, il retrouvera l’argent. La commission d’enquête vient de passer 6 ans sur le dossier. Elle n’a pas retrouvé le moindre billet de 100. Pour Stuart Bowen, l’inspecteur général à la reconstruction de l’Irak, « c’est le plus grand vol de l’Histoire ». Cela reste à prouver : à l’heure où les Etats-Unis se retirent d’Afghanistan, on va pouvoir commencer à faire les comptes. Une chose est à peu près sure : le peuple irakien n’en a jamais vu la couleur. C’est d’ailleurs en son nom que le gouvernement irakien, assurément blanc comme neige, vient de réclamer son argent.

Source : marianne2.fr

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