Féminicides en Algérie : L’Obscur Fléau qui Endeuille les Foyers

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Féminicides en Algérie : L'Obscur Fléau qui Endeuille les Foyers

L’Algérie, ce pays nord-africain riche en culture et en histoire, est le théâtre d’une tragédie silencieuse et effroyable : les féminicides. Au cours des années 2019 à 2022, pas moins de 228 femmes ont perdu la vie dans des circonstances choquantes, victimes de violences sexistes. Ces meurtres ont ébranlé la société algérienne et appellent à une réflexion profonde sur la condition des femmes dans ce pays.

Les Chiffres Terrifiants

Les statistiques sont alarmantes. Sur les 228 féminicides recensés, la grande majorité des agresseurs étaient des personnes connues des victimes. Un triste constat qui met en lumière la réalité de la violence domestique en Algérie. Les chiffres montrent que 51% de ces crimes sont commis par le partenaire ou l’ex-partenaire de la victime, 37% sont perpétrés par un ou des membres de la famille, et 12% sont le fait de connaissances ou de personnes inconnues de la victime.

Ces meurtres ne sont pas des actes spontanés, mais plutôt le résultat d’années, voire de décennies, de violences, de menaces et, dans certains cas, de tentatives de féminicide. Une effrayante constatation est que 71% de ces meurtres ont lieu dans des espaces clos, principalement au domicile conjugal ou familial. Des armes, telles que des couteaux ou des armes à feu, ont été utilisées dans 65% des cas. Les victimes, quant à elles, ont des âges allant de 5 ans à 85 ans, mettant en lumière la transversalité de ce fléau.

Ces données glaçantes sont extraites d’un rapport intitulé « Meurtres de Femmes et de Filles » élaboré par Wiame Awres, une chercheuse dévouée à l’analyse des féminicides en Algérie. Son travail vise à briser le silence autour de ces crimes abominables et à sensibiliser l’opinion publique à cette réalité tragique.

L’Analyse des Données

Lors d’une conférence de presse récente tenue au siège du Réseau Wassila, Wiame Awres a présenté les résultats de son rapport, fruit de trois années d’études sur les féminicides en Algérie, couvrant les années 2020, 2021 et 2022, avec un retour rétrospectif sur les cas signalés en 2019 par la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN). Les travaux de Féminicides Algérie se sont également penchés sur les motifs de ces meurtres et le déroulement de certains procès.

Le rapport préliminaire met en lumière les mécanismes complexes qui sous-tendent les féminicides en Algérie. Il offre une interprétation des données quantitatives et combine des éléments relatifs au cadre légal avec des informations recueillies sur le terrain. Une approche holistique qui éclaire la réalité de ces crimes odieux.

Les Profils des Victimes

Le rapport révèle que les victimes de ces féminicides sont principalement des femmes âgées de 30 à 39 ans, représentant 25% des cas. Elles sont suivies par celles âgées de 20 à 29 ans et par les femmes de plus de 60 ans, chacune représentant 16% des victimes. Cependant, le spectre des victimes est large, touchant des femmes de tous âges.

Un examen plus approfondi des données révèle des tendances troublantes. Parmi les 16 victimes mineures, 9 ont été tuées par leur père, 2 par leur frère, et une par l’oncle, tandis que les six autres ont été assassinées par leur petit ami ou un voisin. Pour les femmes de plus de 60 ans, 17 ont été assassinées par leurs fils, 8 par leurs conjoints, et les autres meurtres ont été commis par des membres de la belle-famille ou des voisins.

Les Régions Touchées

L’étude montre que la ville d’Alger détient le triste record du nombre de féminicides entre 2019 et 2022, avec 21 cas recensés. Elle est suivie par Oran avec 18 cas, Batna avec 15, et Sétif et Skikda avec 13 et 12 cas respectivement. La région saharienne enregistre moins de féminicides en raison de sa faible densité de population et de la difficulté d’accès à l’information due à son éloignement.

Il est important de noter que ces chiffres ne représentent que la pointe de l’iceberg. Wiame Awres souligne que les chiffres réels des féminicides sont probablement beaucoup plus élevés, nécessitant un accès aux données des autorités médicales légales, de la Gendarmerie et de la Sûreté nationale.

Les Motivations Troublantes

Les motifs avancés par les criminels sont souvent mensongers. Le rapport révèle que de nombreux féminicides sont déguisés en suicides, et seule la version du criminel est entendue et relayée. Les motivations sont diverses, souvent liées aux questions d’héritage, d’honneur, d’adultère, de séparation, de conflits conjugaux et familiaux, ainsi que de troubles mentaux.

Les Plaintes pour Violences

Entre 2019 et 2022, pas moins de 24 244 plaintes pour violences ont été déposées par les femmes à la DGSN, soit une moyenne de 17 plaintes par jour. Cependant, il convient de noter que ces chiffres ne tiennent pas compte des plaintes déposées auprès de la Gendarmerie nationale. Ces plaintes incluent une gamme de violences, telles que les violences physiques, sexuelles, l’inceste, le harcèlement sexuel, le harcèlement dans l’espace public, les mauvais traitements, les enlèvements, les homicides, ainsi que les coups et blessures ayant entraîné la mort.

La Nécessité d’une Action Concrète

Face à cette terrible réalité, les rédacteurs du rapport soulignent que la lutte contre les violences faites aux femmes et les féminicides nécessite une volonté politique réelle et une stratégie nationale solide. Il est impératif de protéger les femmes et de dissuader les auteurs de violences. Mettre fin à la normalisation des violences contre les femmes est une priorité, et il faut s’attaquer aux causes profondes des violences misogynes qui aboutissent souvent au féminicide.

En conclusion, les chiffres des féminicides en Algérie sont une sonnette d’alarme qui ne peut pas être ignorée. Il est temps que la société algérienne et ses dirigeants prennent des mesures concrètes pour mettre fin à cette tragédie silencieuse qui endeuille tant de foyers. Les femmes méritent de vivre en sécurité, sans craindre pour leur vie chaque jour. Il est de notre devoir de faire en sorte que cela devienne une réalité en Algérie.

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