Après une période de 18 mois marquée par une crise diplomatique sans précédent, l’Algérie et l’Espagne semblent enfin renouer avec des relations plus cordiales. Ce rapprochement a été symbolisé par la nomination d’un ambassadeur algérien à Madrid le 16 novembre dernier, un geste diplomatique fort qui pourrait annoncer une reprise des échanges entre les deux pays.
Pendant cette période tendue, l’Algérie avait suspendu le traité d’amitié et de bon voisinage signé avec l’Espagne en 2002, entraînant la fermeture de l’ambassade algérienne à Madrid et un blocage du commerce bilatéral. Cette crise avait débuté en mars 2022, lorsque le gouvernement espagnol dirigé par Pedro Sanchez avait exprimé son soutien au plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental.
Le Dégel Diplomatique : Un Pas en Avant
La nomination d’un nouvel ambassadeur algérien à Madrid a été interprétée comme un signe encourageant d’un début de dégel entre les deux capitales. Abdelfatah Daghmoum a ainsi succédé à Saïd Moussi, nommé à Paris en juillet 2022. En diplomatie, le choix de nommer un ambassadeur après une longue vacance du poste est souvent un signe positif.
Le secteur aérien a également contribué à ce rapprochement. Le gouvernement algérien a donné son feu vert pour la reprise des vols entre Alger et Madrid, suspendus depuis mars 2020 en raison de la crise. Cette décision a été accueillie favorablement, et le nombre de vols entre Alger et Barcelone a également été augmenté.
Les Relations Économiques en Attente
Pour Djamel Eddine Bou Abdallah, président du Conseil d’affaires algéro-espagnol, il existe des signes positifs de reprise des relations économiques entre les deux pays. Il prédit une reprise « imminente » des échanges économiques, soulignant que les relations espagnoles avec l’Algérie se sont adaptées au marché algérien.
Les produits espagnols, notamment la céramique, sont compétitifs sur le marché algérien. Djamel Eddine Bou Abdallah insiste sur le fait que l’arrêt de 19 mois n’a pas remis en question les relations entre les entreprises des deux pays.
Le Maroc en Observateur Vigilant
Cependant, le réchauffement des relations entre Alger et Madrid suscite l’attention du Maroc, qui craint que cela ne se fasse au détriment de sa position historique sur le Sahara occidental. Le Maroc avait réussi à améliorer ses relations avec l’Espagne en 2022 en obtenant le soutien de Madrid pour son plan d’autonomie au Sahara occidental.
La visite récente du ministre espagnol des Affaires étrangères à Rabat n’a pas apaisé les inquiétudes marocaines. José Manuel Albares s’est montré prudent en affirmant que la position de l’Espagne sur la question du Sahara occidental « n’a pas changé », sans reprendre la déclaration qui avait provoqué la colère d’Alger il y a 19 mois.
Les médias marocains ont rappelé cette position et ont salué le fait qu’elle n’ait pas changé, suggérant ainsi que le Maroc reste vigilant quant à l’évolution de la situation. Les tensions ont également été illustrées par le blocage des postes douaniers des enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, ce qui pourrait indiquer une pression accrue du Maroc pour obtenir la reconnaissance de la « marocanité » du Sahara, à l’image des États-Unis et d’Israël.
Une Nouvelle Dynamique en Vue
Le réchauffement des relations entre l’Algérie et l’Espagne suscite l’espoir d’une nouvelle ère de coopération économique et diplomatique. Cependant, la prudence reste de mise, car la diplomatie marocaine surveille de près cette évolution.
L’enjeu est de savoir si cette reprise des relations entre Alger et Madrid se fera au prix d’un réalignement diplomatique de l’Espagne sur la question du Sahara occidental. Dans tous les cas, cette situation en évolution mérite une attention continue, car elle pourrait avoir des répercussions significatives dans la région.
