Harga: un sport national

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    Peut-on quantifier un drame? En Algérie, on n’arrive plus à donner un chiffre exact sur le nombre de harraga «interceptés» par an, par bimestre ou par semaine.

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    Photo: H. Aourgah

    Le «phénomène», comme s’amuse à l’appeler les observateurs très officiels, inquiète et prend de l’ampleur. Un euphémisme, très officiel aussi, pour dire que ça sent la «merde» (hachakoum). Mais qu’importe les chiffres et statistiques. Les malheureux faits-divers marins communiqués, n’indiquent, en réalité, que du nombre de miles parcourus par les patrouilles de gardes-côtes. Un, dix ou dix- mille, est-ce vraiment important?

    Des Algériens songent à fuir leur pays et ne peuvent même plus expliquer pourquoi.

    Si ça ce n’est pas un drame!

    La «harga» est devenue un réflexe collectif et un sport national, auquel s’adonnent hommes et femmes, jeunes et vieux, chômeurs et cadres supérieurs.

    On y va même en famille. Par quel mécanisme psychique, un Algérien décide-t-il de troquer sa vie contre un espoir de vie, aussi illusoire soit-il ? A méditer!

    Que cherche-t-on, si désespérément, en France, en Espagne ou en Italie?

    Les potentiels harraga qu’on croise à tous les coins de rues ne vous aideront en rien à expliquer toute cette pagaille sociale. Même eux n’arrivent plus à y trouver une logique et se contentent de vous lancer un accablant «J’en ai marre de ce pays. Je m’en vais».

    Et c’est à ce moment là qu’on comprend qu’il ne faut pas être sociologue pour expliquer la chose. La harga est une fuite vers l’avant, au sens géographique du terme. C’est la cavale de tous ceux qui se sentent hors-jeu. C’est le placebo de l’espoir et la catharsis du fatalisme cultivé depuis des générations.

    Ce sentiment de démobilisation qui honte tout Algérien, incarné par cette tristement célèbre phrase : «A quoi bon, tout est ficelé».

    Et c’est parce que c’est une fuite qu’il faut la considérer comme un échec réciproque. L’échec d’un pays qui n’a pu créer plus que des frontières, et celui d’un peuple qui préfère mettre la tête sous l’eau, à défaut de pouvoir la sortir.

    Au final, la harga n’est, ni plus ni moins, qu’une tragique métaphore de l’Algérie. Rien ni personne ne pourra expliquer son cas.

    Nassim Brahimi

    Lire également:

    – Les haraga, histoire d’un hémorragie…

    – Émigration clandestine: les chiffres d’un drame national

    – Émigrés africains à Oran: on les appellent « Negraoua »

    – Reportage: les algériens de France, entre réussite et désillusion

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    – La pastille Vichy
    – Changements climatiques et grands projets: un milliard de réfugiés d’ici 2050

    Comments

    Jeux olympiques – Multidisciplinaires |2008-11-26 07:07:15

    Bonjour,

    la harga n’est l’unique sport national.Les algériens cultivent
    plusieurs disciplines olympiques: la fatalité,l’amnésie, l’hypocrisie,
    l’orgueil mal placé, la bigoterie de façade etc
    On est les champions du
    superflu
    Bon courage

    slim16 – on se la brule ! |41.201.209.xxx |2008-12-22 16:45:17

    si je comprend bien , l’Algérien aime bien « bruler les étapes » pour
    s’offrir
    la médaille d’or de l’olympisme du superflu (dixit jeux
    olympiques).Pour
    un peu de sérieux , rejettons plus la faute à d’autres
    personnes qui n’ont pas joué leur rôle de responsables ! il est facile de tout
    mettre sur le dos des jeunes désoeuvrés, malades de leur propre
    paresse….l’Algérien est aussi : « innocent » et victime d’un système
    qui ne lâche rien , même pas ses Harragas ( 6 mois de prison )…
    La Liberté
    n’a pas de prix !!!!!!!!!

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