Pegasus Gate : Le Maroc sous les projecteurs européens, la justice tranche en faveur de la presse libre

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Pegasus Gate : Le Maroc sous les projecteurs européens, la justice tranche en faveur de la presse libre

Le Maroc, depuis la révélation de son implication dans les scandales Pegasus et Morrocogate, se trouve dans une tourmente judiciaire sans précédent en Europe. Le royaume chérifien a fait l’objet de résolutions du Parlement européen, d’enquêtes de presse approfondies, et a subi des revers majeurs dans les tribunaux européens.

Le dernier coup dur en date a été infligé par la cour d’appel de Hambourg en Allemagne, qui a rejeté les plaintes du Maroc contre deux médias allemands, Zeit Online et Süddeutsche Zeitung, accusés de diffamation suite à leur couverture du scandale d’espionnage impliquant le logiciel Pegasus.

L’affaire Pegasus a éclaté au grand jour durant l’été 2021, lorsque plusieurs médias internationaux, en collaboration avec des ONG telles qu’Amnesty International et Forbidden Stories, ont révélé l’ampleur de l’utilisation du logiciel israélien Pegasus par les services de renseignement marocains. Ce logiciel avait été utilisé pour espionner un éventail diversifié de cibles, allant des journalistes indépendants marocains aux défenseurs des droits de l’homme, en passant par les opposants politiques et même des personnalités étrangères de premier plan, dont le président français Emmanuel Macron. Zeit Online et Süddeutsche Zeitung étaient partie prenante de ce consortium de médias ayant exposé ces pratiques d’espionnage.

Le Maroc, confronté à des accusations graves, a réagi en multipliant les plaintes en Europe, visant à réfuter ces allégations et à discréditer les médias et journalistes impliqués. Cependant, jusqu’à présent, sa stratégie judiciaire s’est révélée contre-productive.

L’Allemagne : un nouveau revers pour le Maroc

La cour d’appel de Hambourg a examiné en deuxième instance les plaintes du Maroc contre les deux publications allemandes et s’est penchée sur la question de savoir si les États étrangers peuvent contester devant les juridictions allemandes les critiques médiatiques à leur encontre.

Le verdict de la Cour est sans ambiguïté : les plaintes du Maroc ont été jugées « non fondées » et rejetées, confirmant ainsi le jugement du tribunal de première instance de Hambourg rendu pendant l’été 2022. La Cour a souligné que la critique du pouvoir bénéficie d’une protection légale en Allemagne, car tout « déséquilibre » dans la balance entre le pouvoir et la presse peut « compromettre considérablement » l’exercice de la liberté de la presse.

Le Maroc n’a pas dit son dernier mot et conserve un ultime recours en interjetant appel devant la Cour fédérale allemande. Cependant, ce revers en Allemagne s’ajoute à une série de défaites judiciaires que le Maroc a subies en France, où les tensions sont vives depuis la révélation du ciblage du téléphone du président français Emmanuel Macron.

Le journaliste espagnol Ignacio Cembrero, spécialiste des pays du Maghreb et du Sahara occidental, a également été visé par une plainte du Maroc dans son propre pays, suite à ses accusations concernant l’espionnage de son téléphone par les services marocains. Alors qu’il commentait la décision de la justice allemande, Cembrero exprimait le souhait que la justice espagnole suive le même chemin : « Espérons que les juges en Espagne feront de même dans l’affaire portée contre moi par Rabat, » a-t-il déclaré.

La série de défaites judiciaires en Europe met en lumière les difficultés du Maroc à contrer les allégations qui pèsent contre lui dans l’affaire Pegasus. Les médias, les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme continuent de faire pression pour la transparence et la responsabilité.

Une affaire qui fait tache sur l’image du Maroc

Cette série de revers judiciaires a des implications profondes pour le Maroc, tant sur le plan national qu’international. Alors que le royaume cherchait à consolider sa réputation en tant que destination touristique de premier plan et acteur clé sur la scène diplomatique, les révélations sur l’espionnage massif ont sérieusement terni son image.

Sur le plan national, les accusations d’espionnage ont suscité la méfiance parmi les journalistes, les défenseurs des droits de l’homme et les opposants politiques. La liberté de la presse a été mise en péril, et de nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer ces pratiques. La réputation du gouvernement marocain en tant que garant des droits de l’homme et de la liberté d’expression a été gravement entachée.

Sur la scène internationale, le Maroc a dû faire face à une pression accrue de la part de ses partenaires européens et de la communauté internationale. Les résolutions du Parlement européen condamnant les pratiques d’espionnage marocaines ont jeté une ombre sur les relations entre le Maroc et l’Union européenne. Les questions de droits de l’homme et de respect des libertés fondamentales sont devenues des sujets de préoccupation majeurs dans les discussions diplomatiques.

Conclusion

L’affaire Pegasus a plongé le Maroc dans une crise politique, médiatique et judiciaire qui ne montre aucun signe de s’apaiser. Les récents revers judiciaires en Allemagne et en France ont souligné les limites de la stratégie de contestation du Maroc. L’impact de ces révélations sur l’image du pays, tant sur la scène nationale qu’internationale, est significatif.

Alors que le Maroc continue de faire face à des enquêtes approfondies et à des procédures judiciaires en Europe, il est confronté à un défi de taille : restaurer sa crédibilité et sa réputation tout en préservant les droits fondamentaux de ses citoyens et la liberté de la presse. L’avenir de ce dossier complexe reste incertain, mais une chose est certaine : l’affaire Pegasus continuera de hanter le Maroc pendant un certain temps encore, rappelant l’importance de la transparence et de la responsabilité dans le monde d’aujourd’hui.

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